lundi 27 novembre 2017

Si vous ne l’avez pas encore compris la Cour de cassation vous le répète : les cahiers des charges de lotissement ne sont pas caducs

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La Cour d’appel de Paris aura tenté sa chance.

Comme nous l’avons régulièrement rappelé dans cette chronique, la Cour de cassation juge de manière constante que « le cahier des charges, quelle que soit sa date, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues » (Cf. notamment ses arrêts des 21 janvier, n°15-10566, et 16 octobre 2016, n°15-23674).

En conséquence, la nouvelle rédaction de l’article L. 442-9 du code de l’urbanisme opérée par la Loi ALUR n’a rien changé à la règle selon laquelle la caducité du cahier des charges ne s’applique pas aux relations entre colotis.

En d’autres termes, le cahier des charges de lotissement s’applique de manière permanente entre colotis et l’écoulement du temps ne fait pas obstacle à ce qu’un projet de construction puisse être critiqué devant le juge judiciaire sur le fondement de ce cahier des charges.

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 27 mai 2016, avait retenu au contraire « qu'en application de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est, comme en l'espèce, couvert par un plan local d'urbanisme, que le cahier des charges a été annexé à l'arrêté préfectoral du 28 septembre 1968 approuvant le lotissement et qu'il s'est écoulé plus de dix ans après cette autorisation sans qu'une majorité de colotis, calculée comme il est dit à l'article L. 442-10, ait demandé le maintien de ces règles de sorte que les règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges sont devenues caduques et que M. et Mme Z...sont mal fondés à exciper de leur violation par M. et Mme X... ».

La Cour d’appel de Paris, alors même que la Cour de cassation s’était prononcée en janvier 2016 sur la portée de la réforme de la Loi ALUR, a tenté d’imposer la révolution en jugeant donc que les règles d’urbanisme du cahier des charges étaient devenu caduques entre les colotis passé le délai de 10 ans.

La révolution est cependant sanctionnée par la Cour de cassation, intraitable sur ce sujet, qui confirme sa jurisprudence :

« En statuant ainsi, alors que le cahier des charges d'un lotissement, quelle que soit sa date, approuvé ou non, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

La Cour de cassation remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

Si certains commentateurs  ou certaines professionnels persistaient encore à douter de la portée de la nouvelle rédaction de l’article L. 442-9 du code de l’urbanisme, la Cour de cassation par ce nouvel arrêt ne permet plus d’en douter : la Loi ALUR n’a rien changé à la portée de l’article L. 442-9 du code de l’urbanisme.

La solution de la Cour de cassation est d’ailleurs tellement orthodoxe qu’il a été décidé de ne pas publier cet arrêt au bulletin.

Cass. 3ème Civ., 14 septembre 2017, n°16-21329