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lundi 04 mai 2020

Petite illustration de la participation compensatoire pour la réalisation de places de stationnement

par

La société Foncia Construction, gérante associée du maître d'ouvrage la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins, s'est vu délivrer le 10 novembre 2005 un permis de construire en vue d'édifier un immeuble de logements avec commerces et activités.

Le projet autorisé ne comportant que quatre-vingt-deux places de stationnement au lieu des cent trente-trois places prévues initialement, le maire de Sceaux a délivré, par un arrêté du 14 décembre 2006 (c’était donc il y a plus de 13 ans !), un permis de construire modificatif mettant à la charge du pétitionnaire la somme de 751 686,45 euros au titre de la participation compensatoire prévue par les dispositions de l'article L. 421-3 du code de l’urbanisme, correspondant aux cinquante et une places de stationnement manquantes.

Après avoir acquitté cette participation le 5 mai 2008 à la suite de l'émission d'un titre exécutoire le 14 mai 2007, et estimant que la COMMUNE DE SCEAUX n'avait pas affecté la somme précitée à la création d'un parc public de stationnement, la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins en a réclamé la restitution par lettre du 9 janvier 2014 adressée au maire qui lui a opposé une décision implicite de rejet.

Elle a alors saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui a fait droit à sa demande de restitution par un jugement n° 1404700 du 7 juillet 2017.

La COMMUNE DE SCEAUX a alors interjeté appel de ce jugement et en a demandé le sursis à exécution. Ses requêtes ont été rejetées par un arrêt de la Cour administrative d’appel de VERSAILLES du 29 mars 2018.

Saisi d'un pourvoi de la COMMUNE DE SCEAUX, le Conseil d'Etat a, par sa décision contentieuse n° 420999 du 24 juillet 2019, annulé cet arrêt pour dénaturation des pièces du dossier et renvoyé le jugement de cette affaire à la Cour.

La Cour administrative d’appel de Versailles est donc de nouveau saisie du litige.

Elle rappelle tout d’abord qu’aux termes de l'article L. 421-3 du code de l’urbanisme, dans sa version applicable en l'espèce :

" (...) Lorsque le pétitionnaire ne peut satisfaire lui-même aux obligations imposées par un document d’urbanisme en matière de réalisation d'aires de stationnement, il peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu'il ne peut réaliser lui-même sur le terrain d'assiette ou dans son environnement immédiat, soit de l'obtention d'une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation, soit de l'acquisition de places dans un parc privé de stationnement existant ou en cours de réalisation (...) / A défaut de pouvoir réaliser l'obligation prévue au quatrième alinéa, le pétitionnaire peut être tenu de verser à la commune une participation fixée par le conseil municipal, en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement (...) ".

L'article R. 332-22 du même code, alors en vigueur, prévoyait que : " Le redevable de la participation en obtient, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution : / (...) d) Si, dans le délai de cinq ans à compter du paiement, la commune ou l'établissement public compétent n'a pas affecté le montant de la participation à la réalisation d'un parc public de stationnement ".

Il résulte de ces dispositions que le dégrèvement ou la restitution de la somme versée ne sont dus que si la participation en cause n'a pas été affectée à la réalisation d'un parc public de stationnement dans le délai de cinq ans, et non comme le fait valoir la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins, si la construction du parc de stationnement n'a pas été achevée dans ce même délai.

Il résulte de l'instruction, d'une part, que la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins a acquitté sa participation pour non-réalisation de surfaces de stationnement le 5 mai 2008 et, d'autre part, que la COMMUNE DE SCEAUX a décidé par une délibération du 16 décembre 2009 de réaliser un parc public de stationnement de plusieurs centaines de places dans le secteur de la place du Général de Gaulle et de ses abords.

En outre, il ressort des extraits du grand livre budgétaire et de l'état des recettes grevées d'affectations spéciales annexé (B3) au compte administratif pour les années 2007 à 2013, qu'a produit la commune, que celle-ci a affecté, au projet de réalisation de ce parc public de stationnement, la somme de 2 057,12 euros au titre de l'exercice 2009, de 40 113,84 euros au titre de l'exercice 2010, de 372 164,61 euros au cours de l'exercice 2011, de 118 973,44 euros lors de l'exercice 2012 et enfin le 13 mai 2013, au titre de l'exercice 2013, une somme de 231 341,35 euros, soit un montant total de 764 650,36 euros.

Ces sommes ont permis de financer une mission d'assistance à la réalisation de cette opération, des études environnementales, de programmation et de faisabilité, une étude urbaine, des frais de géomètres et notariés, des publications réglementaires et l'acquisition de terrains bâtis.

Ainsi, il ressort de ces pièces comptables que l'intégralité de la participation pour non-réalisation des aires de stationnement versée par la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins le 5 mai 2008 a été affectée aux études préparatoires et à l'acquisition des terrains nécessaires à la création d'un parc public de stationnement place du Général de Gaulle.

Par conséquent, la COMMUNE DE SCEAUX est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamnée à restituer à la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins le montant de sa participation, soit la somme de 751 686,45 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2014 et capitalisation de ces intérêts à chaque échéance annuelle.

La COMMUNE DE SCEAUX justifiant avoir, à la suite du jugement attaqué, versé le 25 juillet 2018 la somme de 751 686,45 euros augmentée des intérêts au taux légal calculés à compter du 10 janvier 2014 et de leur capitalisation au 10 janvier 2015 pour un montant de 62 610,33 euros, il y a lieu, compte tenu de ce qui précède, de condamner la SCI Sceaux Houdan Quatre Chemins à lui reverser la somme de 814 296,78 euros.

La personne qui, en exécution d'une décision de justice, a, ainsi qu'elle y est tenue en raison du caractère exécutoire de cette décision, versé une somme n'a pas droit à la réparation sous forme d'intérêts moratoires du préjudice subi du fait de ce versement si elle se trouve déchargée par l'exercice des voies de recours de l'obligation de payer cette somme.

Par suite, la COMMUNE DE SCEAUX n'est pas fondée à demander le bénéfice des intérêts de retard sur la somme de 814 296,78 euros, au taux légal à compter de la date à laquelle elle a versé cette somme en exécution du jugement du Tribunal administratif, ni la capitalisation de ces intérêts.

CAA de VERSAILLES, 6ème chambre, 28/04/2020, 19VE02736, Inédit au recueil Lebon